Je me réveille…ma tête me fait tellement mal…j'ouvre un œil et le soleil éclatant m'éblouit, je le referme aussitôt…péniblement je tente de m'asseoir mais suis submergé par une forte nausée… mais qu'est ce que je fous là! que se passe-t-il?...aucune bribe de mémoire, même en cherchant bien…le centre de la douleur semble situé à l'arrière de mon crâne.
Doucement, voire même paresseusement, j'envoie la main gauche en exploration de ce coté là. La sensation au toucher est bizarre, gluante puis devient d'un coup si douloureuse que je pousse un cri…la crampe stomacale se calme et je plisse un œil pour découvrir la main qui est revenue beaucoup plus vite que lors de son départ, beaucoup trop vite diraient certains, ce qui cause un étirement dont mon bras se serait bien passé…comme prévu, le gant est poisseux de sang, mais la paume du gant lui-même est encore plus intrigante! De part et d'autre de la main, des lames de rasoirs sont incrustées dans le cuir, laissant juste le centre de la main libre pour tenir une arme! Voilà la cause de cette douleur subite. Mais ce gant n'évoque aucun souvenir.
Faisant fi de la douleur, je force mes yeux à déplacer leur point de focalisation de plus en plus loin:
D'abord quelques pâquerettes (on doit être au printemps), puis une jolie plaine herbeuse et enfin une grande cité avec 2 tours majestueuses. Alors que je me force à détailler un peu plus les structures de la ville, un flash mémoriel m'aveugle un instant.
Une forêt dense…un ennemi défait implorant le pardon face à moi…des combats qui font rage encore aux alentours. J'aide mon ennemi à se relever, l'adosse à un arbre, et ma main gauche le saisit à la gorge et commence à le soulever de terre. Ces yeux s'exorbitent sous l'effet de la pression sur sa gorge, pendant que cette dernière est en train de s'ouvrir sous l'effet des lames de rasoir. Le sang gicle peu à peu sur mon avant bras…
Je rouvre les yeux sur le paysage idyllique qui m'entoure. De nouveau, seul le bruit des oiseaux se fait entendre.
Au moins je connais la fonction du gant maintenant. Par contre, je ne me sentais pas aussi brutal!
Dans le ciel, un oiseau bizarre vole dans ma direction…zap…nouveau flash
De retour dans cette sombre forêt, l'ennemi s'est écroulé…un homme me parle "Commandeur, il faut pousser notre avantage et reprendre la colline du Svierg, cela nous permettra de fondre la ville de Molshein."…cet homme c'est Lucious, mon fidèle lieutenant…il ne le sait pas encore, mais la flèche que j'aperçois juste à l'instant entre les branchages va le tuer…lui aussi!...ils sont tellement nombreux à être tombés ces derniers jours…et puis tout me revient
La conquête de la Vallée du Sombre Espoir, comme on l'avait surnommée, devait être le point d'orgue de notre offensive. Ce fut simplement une boucherie, des 2 cotés. 40 jours d'âpre lutte dans des conditions climatiques totalement épuisantes, on fait de nous des chiens de guerre crottés et trempés jusqu'à la moelle. Les troupes sont isolées les unes des autres, la cohésion n'existe plus et nous cherchons tous autant à sauver notre peau qu'à apporter notre maigre pierre la possible victoire de notre Empereur Krikdar IV.
L'ironie du sort est que, vu la situation et le nombre de pertes impressionnant de l'Empire Krikdarien, je devrais pouvoir prétendre si je survis, à une promotion de Haut Commandeur, mais que rien actuellement ne me ferais plus plaisir qu'un tonneau de vin et un bon feu!
Voilà ce qu'étaient mes pensées quand, alors que nous courrions comme des dératés, une escouade de Voloriens, certainement moins idiots que les autres et attendant qu'un groupe vienne à leur portée, nous attaqua de coté. Le choc fut rude et je reçu un coup de massue à l'arrière du crâne qui mit un terme à mon combat, ma campagne militaire et ma vie. Adieu promotion, alcool et bon feu, je pourrirai à jamais sur un tapis de feuilles mortes comme moi, le nez plongé dans la boue!
Une main se pose sur mon épaule et une petite voix derrière moi fit: "Commandeur, voici la dernière recrue de votre garde rapprochée" au moment l'oiseau bizarre se posa devant moi. En fait c'est un archange.
Pensant jusqu'alors être seul dans cette plaine magnifique que je sais maintenant être mon au-delà, je me retourne promptement et je découvre que la main sur mon épaule appartient à un centaure.
Je m'enfuis en hurlant, pendant que ma "troupe" hilare, éclate de rire.
"Commandeur, revenez! Nous sommes là pour vous servir!"